Blockchain et technologies émergentes
Cours 27
14 min

AI et Robotique

Lorsque l'on parle de robots, l'intelligence artificielle (IA) n'est jamais très loin dans les esprits. Pourtant, robotique et IA sont deux champs bien distincts, qui peuvent exister l'un sans l'autre. Un robot industriel programmé pour souder des pièces à la chaîne n'a pas forcément besoin d'IA. À l'inverse, un système d'IA peut tourner sur un simple ordinateur, sans bras mécanique ni capteurs. Mais depuis 2010, la robotique est sans doute le secteur où l’impact de l’IA est le plus spectaculaire et le plus tangible. C'est un peu la vitrine des progrès de l'IA, celle qui frappe le plus les esprits et suscite le plus de fascination (et parfois d'inquiétudes).

Dans cet article, c'est cette passionnante synergie entre “corps” et “esprit” artificiels que nous vous invitons à explorer.

La convergence naturelle entre la robotique et l’intelligence artificielle (IA)

Depuis la nuit des temps, l'homme rêve de créer des machines à son image, dotées d'une intelligence qui leur serait propre. Dans l'Antiquité déjà, Homère chantait les louanges des automates divins, ces merveilles d'ingéniosité forgées par Héphaïstos en personne. Ces mythes fondateurs ont nourri l'imaginaire des siècles durant, inspirant les inventeurs qui cherchèrent à créer des machines automatiques, comme les horloges à automates du Moyen-Âge ou les androïdes du XVIIIe siècle.

Mais c'est en 1950 qu'un tournant décisif s'opère. Dans un article qui fera date, “Computing Machinery and Intelligence”, le visionnaire Alan Turing pose une question aussi simple que profonde : une machine peut-elle penser ? Plus précisément, peut-on concevoir un artefact dont le comportement serait en tout point indiscernable de celui d'un être humain ? C'est le fameux test de Turing, un défi qui va longtemps paraître insurmontable.

Il faudra attendre les années 2010 et l'avènement du deep learning pour que le rêve de Turing commence à prendre corps. Cette technique révolutionnaire, qui s'inspire du fonctionnement même de notre cerveau, ouvre des perspectives vertigineuses. Grâce à des réseaux de neurones artificiels capables d'apprendre par eux-mêmes, les machines deviennent soudain douées de perception, de compréhension, voire de raisonnement. Elles peuvent reconnaître un visage, transcrire la parole, analyser le langage avec une finesse inégalée.

C'est là que la Robotique entre en scène. En intégrant ces modèles d'IA dans des systèmes physiques, on donne littéralement un corps à l'intelligence artificielle. Les robots cessent d'être de simples automates pour devenir des entités autonomes, capables : 

  • Voir et comprendre leur environnement, identifier les objets qui les entourent, comme les pièces à assembler sur une chaîne de production, en étant équipés de caméras et d'algorithmes de reconnaissance d'images.

  • Planifier et s'adapter, décomposer une tâche complexe en étapes et trouver la meilleure façon de l'accomplir, recalculer leur plan si un imprévu survient.

  • Apprendre par eux-mêmes, s'améliorer en pratiquant, apprendre le meilleur geste pour saisir un objet, en essayant encore et encore.

  • Communiquer naturellement, dialoguer avec nous de façon presque humaine en  combinant reconnaissance vocale, synthèse de parole et compréhension du langage.


Les applications actuelles de l'IA en robotique

Il y a aujourd’hui une fertilisation croisée assez fascinante entre Robotique et IA. D'un côté, l'IA permet de créer des robots plus performants et plus polyvalents, présents dans l'industrie, la santé et les services. De l'autre, la robotique incite les chercheurs en IA à relever de nouveaux défis : comment interpréter des visuels complexes ? Comment manipuler des objets délicats ?

Industrie

Dans l'industrie, l'IA permet aux robots d'être plus flexibles et adaptables. Prenons l'exemple d'une usine automobile. Les robots d'assemblage sont maintenant équipés de caméras et de logiciels de reconnaissance d'images pour vérifier la conformité des pièces, détecter les défauts et s'adapter aux nouvelles pièces sans reprogrammation. C'est l'apprentissage automatique : le robot apprend par l'expérience, comme un humain.

Les cobots, ou robots collaboratifs, sont un autre exemple. Conçus pour travailler aux côtés des ouvriers, ils détectent la présence humaine grâce à leurs capteurs et IA et ajustent leurs mouvements en conséquence. Ils comprennent aussi les commandes vocales et les gestes, rendant la collaboration plus naturelle et intuitive.

Santé

En santé, l'IA et la robotique sont utilisées de diverses manières. La chirurgie assistée par robot est l'une des applications les plus impressionnantes. Le chirurgien contrôle des bras robotiques précis qui réalisent des gestes minutieux à l'intérieur du patient. L'IA guide ces gestes en analysant les images 3D en temps réel et peut corriger les tremblements du chirurgien. Résultat : une chirurgie plus précise, moins invasive, avec moins de complications et une récupération plus rapide.

Les robots assistent aussi les soignants au quotidien. Des robots mobiles autonomes transportent médicaments, échantillons ou matériel médical entre les services. Guidés par leur IA et leurs capteurs, ils naviguent dans les couloirs, prennent les ascenseurs et interagissent avec le personnel via un écran tactile, libérant du temps pour les soignants.

Restauration

L'IA et la robotique font leur apparition dans les restaurants. Certains établissements utilisent des robots pour accueillir les clients, prendre les commandes et servir les plats. Équipés de reconnaissance vocale et d'interfaces en langage naturel, ils dialoguent avec les clients et font des recommandations basées sur l'analyse des commandes précédentes.

En cuisine, des robots assistent les chefs dans la préparation. Certains cuisinent de manière autonome des hamburgers ou des pizzas, de la préparation à la cuisson. L'IA contrôle chaque étape pour assurer une qualité constante. D'autres robots découpent les légumes, dosent les ingrédients ou assemblent les assiettes, assistant les cuisiniers dans les tâches répétitives pour qu'ils se concentrent sur la créativité et la qualité.

Agriculture

L'agriculture bénéficie grandement de l'IA et de la robotique. Les drones équipés de caméras et d'IA surveillent les cultures. Ils prennent des images aériennes détaillées, analysées pour détecter maladies, parasites ou carences en nutriments. Les agriculteurs peuvent alors intervenir de manière ciblée, réduisant l'usage de pesticides et d'engrais.

Au sol, des robots autonomes désherbent, sèment ou récoltent. Les robots désherbeurs utilisent la vision par ordinateur pour distinguer les mauvaises herbes des plantes cultivées et appliquer précisément de petites doses d'herbicide. Pour les récoltes, des robots cueilleurs reconnaissent les fruits mûrs et les cueillent délicatement. Certains fonctionnent même de nuit, un atout pour les récoltes rapides.

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L’IA et les robots au coeur de notre quotidien

L'IA est de plus en plus présente dans nos maisons à travers ce qu'on appelle la domotique, ou la maison intelligente. Il s'agit d'un ensemble de technologies qui permettent de contrôler et d'automatiser différents équipements de la maison, comme l'éclairage, le chauffage, les volets, ou encore les appareils électroménagers.

Au cœur de ces systèmes, on trouve souvent un assistant vocal intelligent, comme Alexa d'Amazon, Siri d'Apple ou Google Assistant. Grâce à l'IA, ces assistants sont capables de comprendre nos commandes vocales en langage naturel et d'y répondre de manière pertinente. On peut leur demander d'allumer les lumières, de régler la température, de nous donner la météo ou de lancer notre playlist préférée, tout cela sans bouger du canapé.

Mais l'IA ne se limite pas aux assistants vocaux. De plus en plus d'appareils deviennent “intelligents” grâce à des algorithmes qui leur permettent de s'adapter à nos habitudes et à nos préférences :

  • Les robots domestiques : Parmi les plus populaires, on trouve les aspirateurs robots. Équipés de capteurs et d'algorithmes de navigation, ils cartographient notre intérieur et nettoient de manière autonome. Mais d'autres robots sont en développement pour nous assister dans diverses tâches quotidiennes, du pliage de linge à la préparation de repas simples.

  • Les robots éducatifs : Ils sont utilisés pour enseigner la programmation et stimuler la créativité des élèves. D'autres servent d'assistants pédagogiques, aidant les élèves à apprendre à lire, à compter ou à pratiquer une langue étrangère. Grâce à leur IA, ils peuvent s'adapter au niveau et au rythme de chaque élève, offrant ainsi un soutien personnalisé.

  • Les jouets intelligents : Des poupées peuvent tenir des conversations simples avec les enfants, tandis que des robots jouets peuvent interagir de manière personnalisée avec chaque membre de la famille. Même nos loisirs numériques sont influencés, avec des jeux vidéo utilisant l'IA pour créer des adversaires plus réalistes.


Études de cas : quand l'IA et la robotique révolutionnent des industries

Siemens : une usine du futur à Amberg

Le géant allemand Siemens a développé une usine entièrement automatisée à Amberg, en Allemagne. Dans cette “usine du futur”, des robots collaboratifs (ou cobots) travaillent main dans la main avec les opérateurs humains pour produire des composants électroniques. Grâce à l'IA, ces cobots s'adaptent en temps réel à la demande et aux aléas de production.

Des algorithmes d'apprentissage automatique analysent en continu les données pour optimiser les processus et prédire les pannes. Résultat : une qualité proche de la perfection (99,9988%), une productivité accrue de 30% et des coûts réduits de moitié. Un exemple frappant de ce que l'industrie 4.0 peut apporter.

Exotec : le robot logistique Skypod chez Renault

La startup française Exotec a développé le Skypod, un robot mobile intelligent capable de se déplacer dans les allées d'un entrepôt pour aller chercher les produits commandés. Chez Renault, 191 de ces robots ont été déployés dans l'entrepôt de pièces détachées. Au lieu que les employés parcourent des kilomètres chaque jour, les Skypods leur apportent directement les pièces dont ils ont besoin.

Un logiciel d'IA coordonne ce ballet de robots pour optimiser chaque mouvement. Le temps de traitement d'une commande est ainsi passé de 2 heures à seulement 20 minutes ! De quoi améliorer significativement la qualité de service et la compétitivité de Renault sur le marché de l'après-vente automobile.

Intuitive Surgical : le robot chirurgien Da Vinci

Intuitive Surgical est le leader mondial de la robotique chirurgicale avec son robot Da Vinci. Présent dans plus de 8600 blocs opératoires, il a déjà assisté les chirurgiens dans plus de 7 millions d'interventions. Grâce à ses instruments miniaturisés et sa vision 3D haute définition, le Da Vinci permet des opérations d'une extrême précision.

L'IA guide les gestes du chirurgien en filtrant d'éventuels tremblements. Pour les patients, cela se traduit par des chirurgies moins invasives, moins de complications et une récupération plus rapide par rapport à une chirurgie traditionnelle. Avec un chiffre d'affaires dépassant les 7 milliards de dollars, Intuitive Surgical prouve que la robotique médicale est aussi un marché très porteur, au service de la santé.


IA et robotique : panorama détaillé des acteurs principaux

Robotique avancée

  • Boston Dynamics : Véritable pionnier de la robotique mobile, Boston Dynamics a marqué les esprits avec Spot, son robot quadrupède aux allures de chien. Aussi agile qu'un animal, Spot est capable de monter des escaliers et d'ouvrir des portes. Sur des vidéos, on l’a vu à l'œuvre dans des environnements hostiles, des chantiers dangereux ou des zones sinistrées. Avec Atlas, elle a aussi créé un robot humanoïde aux prouesses physiques stupéfiantes, capable d'enchaîner les sauts périlleux et de soulever de lourdes charges.

  • Agility Robotics : Dans la course à la création de robots toujours plus humanoïdes, Agility Robotics a surpris son monde avec Digit, est un robot bipède doté de bras et de mains. Capable de soulever des colis pesant jusqu'à 18 kg et de naviguer dans des environnements conçus pour les humains, Digit semble tout droit sorti d'un film de science-fiction. Mais son application la plus prometteuse est bien réelle : il a été testé par le constructeur automobile Ford pour livrer des colis, en les portant du camion jusqu'à la porte du client.

Automatisation industrielle

  • ABB Robotics : Cette jeune pousse est la plus ambitieuse dans la collaboration homme-machine avec YuMi, un robot à deux bras spécifiquement conçu pour travailler aux côtés des ouvriers. YuMi excelle dans les tâches délicates, comme l'assemblage de minuscules composants horlogers.

  • KUKA Robotics : Acteur majeur de la robotique industrielle, la firme allemande possède toute une gamme de robots. Son fleuron, le KR Quantec, est un bras robotique géant capable de soulever jusqu'à 300 kg. Il a déjà conquis les usines automobiles du monde entier, où il manipule les pièces lourdes de carrosserie.

IA pilotant les robots

  • Nvidia : Le géant des processeurs graphiques s'est lancé dans une nouvelle aventure avec Jetson Xavier, une puce pas plus grande qu'une carte de crédit. Ce “cerveau” miniature mais surpuissant permet aux robots d'analyser en temps réel les images capturées par leurs caméras. Avec déjà plus de 6000 applications, comme dans les centres de recyclage où des robots équipés de Jetson parviennent à trier les déchets ménagers (une tâche particulièrement difficile, même pour un œil humain entraîné !).

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Les défis d'un monde de plus en plus robotisé et intelligent

Dans cette course effrénée vers l'IA et la robotique, il est crucial de prendre le temps de la réflexion et de poser les garde-fous nécessaires. Car si ces technologies sont porteuses d'immenses promesses, elles soulèvent aussi des défis juridiques, éthiques et sociétaux sans précédent.

Le cadre juridique

Sur le plan juridique, nos lois et règlements semblent dépassés par le rythme des avancées. Comment encadrer ces algorithmes qui prennent des décisions de plus en plus importantes, de l'octroi d'un crédit à une condamnation en justice ? Comment protéger notre vie privée face à ces robots qui collectent chaque jour davantage de données sur nous ? Il est urgent d'adapter notre arsenal législatif pour garantir un développement responsable et respectueux de nos droits fondamentaux.

Le cadre éthique

Mais le droit ne suffit pas. Il faut aussi une boussole éthique pour naviguer dans ces eaux troubles. Peut-on confier à une IA des décisions de vie ou de mort, qu'il s'agisse d'un diagnostic médical ou de la conduite d'un véhicule autonome ? Comment s'assurer que ces systèmes ne reproduisent pas, voire n'amplifient pas, nos biais et nos préjugés ? En 2016, Microsoft en a fait l'amère expérience avec Tay, un chatbot qui s'est mis à tenir des propos racistes sur Twitter. Il est temps d'ouvrir un large débat de société pour définir ensemble les limites à ne pas franchir.

Les risques de piratage et les bugs

Sur le plan technique aussi, la vigilance est de mise. Malgré leurs prouesses, les systèmes d'IA restent fragiles, sujets aux erreurs, aux bugs et aux piratages. Imaginez les conséquences d'un robot médical piraté, d'un algorithme boursier défaillant... Les enjeux de sécurité et de fiabilité sont cruciaux et nécessitent un effort de recherche et de standardisation sans précédent.

Les impacts sur l'emploi

L'impact de l'IA et de la robotique sur l'emploi est aussi une préoccupation majeure. Selon une étude, 20 millions d'emplois industriels pourraient disparaître d'ici 2030, remplacés par des machines. C'est un véritable choc social en perspective. Il est urgent d'investir dans la formation pour préparer les travailleurs aux métiers de demain. Et de repenser notre protection sociale pour accompagner ceux qui seront les plus touchés par cette transition.

Conclusion

Une chose est sûre : la convergence de l'IA et de la robotique n'en est qu'à ses débuts. Dans les usines du futur, les cobots, ces robots collaboratifs conçus pour travailler main dans la main avec les humains, capables d'apprendre de leurs erreurs et de s'adapter à notre présence, redéfiniront la notion même de travail.

Mais c'est peut-être dans nos rues que la révolution sera la plus visible. Les véhicules autonomes vont transformer notre façon de nous déplacer. Plus sûrs, plus efficaces, ils vont certainement fluidifier le trafic et réduire les accidents. La mobilité du futur sera intelligente, connectée, et peut-être même partagée.

Pour rendre cette vision possible, les robots équipés d'IA devront encore franchir de nombreux caps. Savoir reconnaître des images, traiter du langage naturel, raisonner sur des sujets abstraits ... Les défis sont immenses, mais les progrès sont tout aussi fulgurants. Avec l'avènement du deep learning, les machines apprennent à un rythme effréné, se rapprochant chaque jour un peu plus des capacités humaines.

C’est pour ces raisons que la course à l’IA ne doit pas nous faire oublier les enjeux éthiques qu'elle soulève. Les questions sont nombreuses et pressantes : comment gérer les biais dans les algorithmes ? Comment respecter la vie privée ? Qui sera responsable en cas d'accident ? Il faut y répondre collectivement, pour s'assurer que cette technologie reste au service de l'humain, et non l'inverse.

L'impact sur l'emploi est un autre défi majeur. Si certains métiers seront inévitablement automatisés, d'autres verront le jour, autour de la conception, de la maintenance et de la supervision de ces systèmes intelligents. La transition sera complexe, et nécessitera un effort sans précédent de formation et d'adaptation. Mais elle est aussi porteuse d'espoir, celui d'une société où les tâches les plus pénibles et répétitives seront confiées aux machines, libérant l'homme pour des activités plus créatives et épanouissantes.

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